Black Mirror est de retour. Et il l’a fait pratiquement en silence. Jusqu’à hier, il n’y avait pas de bande-annonce ou autre information officielle au-delà du titre (Bandersnatch) et du fait que c’était un film. Le reste était des rumeurs et des fuites, certaines d’entre elles sont sorties cette semaine pour donner un peu de battage médiatique à la question.

Dès ce matin sur Netflix, il y a donc déjà ‘Black Mirror : Bandersnatch‘, le premier film de la série qui est un’Choose your own adventure’ avec environ cinq heures d’images, des millions de possibilités (c’est-à-dire pas tant que ça), environ cinq finales (j’en ai traversé trois, je crois, je vais y arriver) et une durée moyenne de visionnement de 90 minutes.

Attention : à partir de là, nous entrons dans l’intrigue du film et comment ses différents fils se développent, donc il peut y avoir des spoilers.

L’histoire s’inspire d’un des nombreux « jeux maudits » des années 1980 qui peuplent les légendes urbaines de l’ère 8-bit. Nous sommes en 1984 et Stefan (Fionn Whitehead) est un jeune programmeur qui se lance dans le grand projet d’adapter au jeu vidéo un livre comme « Choisis ta propre aventure » de Jérôme F. Davies, un écrivain visionnaire en avance sur son temps mais aux théories très intéressantes.

Le jeu, qui innove en ce sens que les commandes sont gérées avec le joystick et non par saisie de texte, sera développé pour Tuckersoft, une société émergente de jeux vidéo qui a dans son équipe Colin (Will Poutner), un jeune designer aux idées très similaires à celles de Stefan. C’est là que nous avons le premier choix pertinent : travailler au bureau ou à la maison.

Vous choisissez, mais Black Mirror propose et Netflix dispose (ou vice versa)

Si vous choisissez de travailler chez Tuckersoft, le film se termine… et nous arrivons au premier’Game Over’ de’Bandersnatch’. Dans les cinq mois de production du jeu rien d’intéressant ne s’est passé et les critiques déchirent le jeu pour être horrible et court. Tu recommences parce que l’histoire de Charlie Brooker t’oblige à prendre un chemin.

Et ce ne sera pas le seul moment dans la vidéo où nous serons obligés de choisir un chemin. Quelque chose qui fait partie de la culture du genre avec ces pages qui vous disaient « allez, retournez à la page 16 ». L’un des aspects les plus frappants du concept « laissez le public choisir »/ »choisissez votre propre aventure » est la manière dont les élections se déroulent encore.

Nous devons aller à des jeux dans des mondes complètement ouverts (‘RDR2’, par exemple) pour avoir l’impression que vous êtes vraiment en charge de quelque chose. En ce sens, j’aime beaucoup me souvenir de  » La parabole de Stanley  » pour la façon dont elle parodie cette réalité des jeux… et de la vie.

C’est nous qui réalisons ou les marionnettes Brooker et Slade ? Il est intéressant de voir comment les créateurs établissent le pacte avec le spectateur. Dans quelle mesure doivent-ils nous laisser le contrôle ou si ce qui arrive au protagoniste est déjà prédestiné dès le début et nous pensons qu’il en est ainsi. Tout autour de Stefan et de la compagnie nous fait penser qu’il n’y avait pas trop de place pour nous.

Dans ce que nous pourrions considérer comme le deuxième acte de  » Bandersnatch « , nous en apprenons davantage sur les antécédents familiaux du jeune Stefan et sur la façon dont il se soigne depuis des années à la suite de la mort tragique de sa mère dans un accident où il était petit (ce que le film insiste pour dire que vous en savez beaucoup) et qui ouvre la porte au soupçon que le personnage principal ignore autre chose.

Se souvenir de ce fait est combiné avec la brève exploration de Jérôme F. Davies et ses théories (il m’a rappelé dans une certaine mesure l’utopie et d’autres fictions similaires) nous fait toujours avoir à l’esprit le sujet du choix et du libre arbitre. Il arrive un moment où, en fait, le protagoniste est conscient que nous le contrôlons. Et on est Brooker qui nous emmène où il veut.

Une des finales du film est, en fait, tout un but avec la rupture du quatrième mur et le protagoniste nous dédie ses dernières paroles. Une autre intrigue que nous pouvons (ou ne pouvons pas) voir est tout un voyage psychotrope dans lequel la liberté, le contrôle et ce qui motive nos mouvements sont discutés. Beaucoup de combinaisons mais toutes en faveur du casino.

Variations sur le même sujet dans Black Mirror : Bandersnatch

Comme dans les variations d’une œuvre musicale, on retrouve différentes teintes pour une même mélodie. Nous devons d’une manière ou d’une autre laisser grandir l’histoire et la thèse omniprésentes de Charlie Brooker sur la façon dont les technologies nous guident plus que nous ne voulons en être conscients.

Ajoutez à cela une dose de paranoïa et de conspiration et voilà, la seule différence entre ce film et un chapitre aléatoire de’Black Mirror’ est que dans ce’Black Mirror’ vous pouvez choisir’ quelque chose. En fait, selon vos choix, la fin change plus dans la forme que dans le fond. Le projet’Bandersnatch’ est destiné à être maudit dès le début et il n’y a pas de bonheur possible.

Il est curieux, surtout, que Brooker anticipe en quelque sorte nos critiques à travers les scènes de « l’épilogue ». Nous regardons une émission de télévision des années 1980 dans laquelle un critique (ou dans d’autres cas, un journaliste) raconte comment il s’est avéré être  » Bandersnatch  » (le jeu) dans un commentaire dirigé plus vers nous (et nos décisions) que vers un spectateur fictif.

Black Mirror : Bandersnatch’ est une expérience louable qui, dans le respect de la tradition de ce type d’œuvres, sera plus connue pour sa particularité que pour être un bon épisode. En arrière-plan, nous nous retrouvons avec une histoire de plus de tant de choses que nous sommes habitués à la série britannique (la franchise serait le bon terme ?).

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